Diane Gautret
Famille chrétienne, 15 octobre 97

Le courage de pardonner

Est-il possible de pardonner ? Peut-on tout pardonner ? Peut-on pardonner l'impardonnable ? Depuis quelques années, d'une façon ou d'une autre, la question revient régulièrement à la une des magazines... Résumons brièvement le reportage de "La 25e heure" : un soir d'été 1979, au Canada, deux adolescents sont sauvagement assassinés sur le pont Jacques-Cartier. Les parents de Maurice préfèrent "oublier que pardonner" ; ceux de Chantal déclarent publiquement qu'ils pardonnent au meurtrier, comme Jésus a pardonné. Quel témoignage de foi à méditer !.. Le thème du pardon, semble-t-il, est à la mode. À moins qu'il ne révèle de véritables angoisses métaphysiques et spirituelles. Celles d'une société qui a perdu le sens de la personne humaine et de l'amour. Car le pardon - on le pressent bien, à défaut de le comprendre - contient le secret de notre humanité et, ultimement, de notre salut ("Dieu ne pardonne que celui qui, à son tour, a le courage de pardonner", rappelait le Pape, en avril 1997, à Sarajevo). Sans pardon, "l'enfer c'est les autres" ; et par contamination, la société tout entière. D'où les grandes interrogations de notre époque post-nietzschéenne.

Mais la grande tentation actuelle est d'exalter, au nom de la fraternité universelle, un pardon-vertu (compris comme un impératif moral) et de refuser le pardon-miséricorde de l'Evangile (assimilé à de la faiblesse). Comme le montrent les parents de Chantal Dupont, le pardon n'est pas l'oubli de l'offense ni l'expression d'une justice dévoyée. Mais un acte libre d'amour, posé au terme d'un long chemin de guérison, qui, au-delà du mal et du péché, restaure la personne dans sa vocation à faire le bien. C'est dans la contemplation du Mystère pascal que l'on peut s'ouvrir au pardon et apprendre à en vivre.

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